• 15 November 2025

L’interdiction administrative de paraître sur les points de deal, déployée à Angers contre le narcotrafic, voit son efficacité et ses implications analysées.

Lutte contre le narcotrafic : L’interdiction administrative de paraître sur les points de deal, une nouvelle mesure testée à Angers. C’est un outil supplémentaire pour lutter contre le trafic de drogue. L’interdiction de paraître sur les points de deal, nouvelle mesure administrative, a été déployée à Angers. Il s’agit d’une première en France. Dans ce quartier d’Angers, où les trafiquants opèrent à ciel ouvert, des dealers se comportent comme chez eux. Pour éloigner des points de vente les guetteurs et autres « charbonneurs », les préfets disposent désormais d’une nouvelle arme de police administrative, utilisée pour la première fois à Angers, dans un quartier particulièrement affecté par le trafic de drogue. Un homme, arrêté en train de vendre des stupéfiants, s’est vu signifier dès le lendemain, par un arrêté préfectoral, l’interdiction de se rendre sur ce point de deal pendant un mois. Pour Jérôme Hanarte, secrétaire départemental d’Al liance Police nationale, cette mesure constitue « une réponse immédiate ». Il a précisé : « la décision judiciaire, elle n’est pas toujours immédiate. Il faut un temps, il faut arriver devant le tribunal. Alors que là, c’est effectivement aussi un signe important pour les habitants des quartiers de se rendre compte qu’il y a une réponse rapide, immédiate. » Auparavant, seul un juge était habilité à prononcer une interdiction de paraître sur un point de deal. En vigueur depuis l’été, dans le cadre de la loi contre le narcotrafic, cette mesure administrative se veut complémentaire de l’action judiciaire, visant à éloigner les petites mains du trafic, mais également les consommateurs. Éric Bouillard, procureur de la République d’Angers, a souligné l’intérêt de cette disposition pour les consommateurs : « C’est très intéressant pour les consommateurs, en réalité qui ne sont pas traités, qui ne peuvent pas être traités dans leur masse au quotidien et dan s l’urgence par la justice, de pouvoir avoir assez rapidement une mesure administrative, soumise encore une fois à un contrôle administratif, qui les éloigne des points de deal. » Toutefois, cette mesure peine à convaincre les avocats, qui s’interrogent sur son efficacité et s’inquiètent d’un recul des libertés. Olivier Rolland, avocat, a estimé : « Cela va à l’encontre de la présomption de nuisance, puisque ça voudrait dire qu’on interdirait à certaines personnes d’être à certains endroits, avant même d’être jugées. La légalité, elle se traduira devant les tribunaux administratifs, complètement engorgés et sur lesquels on va rajouter du contentieux. » Un autre volet du texte législatif concerne l’expulsion locative. Le préfet peut désormais « enjoindre aux bailleurs sociaux et privés de saisir le juge judiciaire en résiliation du bail locatif » pour des troubles liés au trafic de drogue ou si les locataires, par leur « comportement ou activité, aux abo rds des locaux loués ou dans le même ensemble immobilier, portent atteinte aux équipements collectifs utilisés par les résidents, à la sécurité des personnes ou à leur liberté d’aller et venir ». En cas d’absence de réponse de la part du bailleur, le préfet peut se substituer à lui pour saisir le juge. Lors de l’examen de la proposition de loi au Parlement, de nombreuses associations se sont élevées contre ce dispositif qui facilite l’expulsion de locataires. Dans un communiqué, le Collectif des associations pour le logement avait exprimé ses craintes sur un texte qui « présente le risque majeur d’étendre de manière disproportionnée, et sans limites claires, le champ des motifs d’expulsions locatives, mêlant injustement et de manière disproportionnée ordre public et droit à la vie privée et familiale ». Le non-respect de l’interdiction administrative de paraître est passible d’une peine de six mois de prison et de 3 750 euros d’amende.